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Channel: La Cause Littéraire
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Résister ne sert à rien, Walter Siti

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Résister ne sert à rien (Resistere non serve a niente), traduit de l’italien par Serge Quadruppani, février 2014, 298 p. 21 €

 

L’auteur annonce d’entrée, en préambule, son parti-pris littéraire, en citant Graham Greene :

Le genre narratif est plus sûr : beaucoup d’éditeurs auraient peur de publier des essais sur ces thèmes.

Il a raison : ces thèmes, le lecteur s’en aperçoit très vite, sont explosifs, et la réalité à laquelle ils réfèrent est de la nature de la bombe à fragmentation.

Walter Siti, connaisseur averti des rouages occultes de la haute finance, aurait pu, c’est évident, tant paraît étendue sa science des mécanismes spéculatifs, choisir d’y consacrer un essai, voire une thèse, volumineuse, qui serait apparue comme un brûlot susceptible de réduire son auteur en cendres.

Il en a fait un roman incendiaire, dont l’acteur principal est Tommaso, le fils unique d’un mafioso italien minable, d’un fusible de l’Organisation qui passe une grande part du temps du récit en prison.

Rédacteur

Patryck Froissart

La petite lumière, Antonio Moresco

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La petite lumière (La lucina) traduit de l’italien par Laurent Lombard, septembre 2014, 128 p. 14 €

 

 

Vraie découverte que ce premier récit traduit en français de l’italien Antonio Moresco. Une précieuse « petite lune », pour reprendre les mots mêmes de l’auteur, qui s’est détachée de son grand œuvre, pas encore publié, Increati (Les incréés) qui viendra clore un livre unique (à tous les sens du terme semble-t-il) de près de trois mille pages dont les premières étapes ont été Gli esordi (Les débuts) et Canti del caos (Chants du chaos), que les lecteurs français ne connaissent pas encore. Un grand œuvre que l’auteur a commencé il y aujourd’hui trente ans et dont cette lune détachée, écrite en 14 jours, s’est imposée à lui dans une urgence d’écriture venue de loin et à laquelle il tient beaucoup. L’intimité de cette œuvre et sa profondeur s’imposent aujourd’hui à nous, pour notre plus grand bonheur.

Rédacteur

Marc Ossorguine

Silence, Giovanni Pozzi

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Silence, novembre 2014, traduit de l’italien et préface François Dupuigrenet-Desroussilles, 128 p. 14 €

 

« L’homme est un solitaire qui n’est pas seul »

Giovanni Pozzi

 

« Il se tait », traduction littérale du titre Tacet donné par le frère Giovanni Pozzi, paru six mois avant sa mort, en 2002, est publié sous le titre Silence, aux éditions Payot. Proverbe italien ou extrait de la Bible, Ecclésiaste 3, 1, 7 « il y a un temps pour se taire et un temps pour parler », ont peut-être été à l’origine du choix de ce titre !

Le père capucin Giovanni Pozzi (1923-2002) était un religieux lettré, de ceux trop rares qui encombrent les gardiens de la doxa et dont la pensée humaniste huile les secs canaux mentaux des docteurs de la Loi. Après des études de théologie, il entre dans l’ordre des capucins. A partir de 1960, il occupe la chaire de littérature italienne et de philologie romane à l’université de Fribourg et, en 1988, il se retire dans le couvent de Lugano. Là, recueilli, il dit la messe chaque matin, avant l’aube, vit de prières… et de livres.

Rédacteur

Marc Michiels (Le Mot et la Chose)

Querelle autour d’un petit cochon italianissime à San Salvario, Amara Lakhous

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Querelle autour d’un petit cochon italianissime à San Salvario (Contesa per un maialino italianissimo a San Salvario) octobre 2014, traduit de l’italien par Elise Gruau, 208 pages, 20 €

 

« E la nave va »

Enzo est journaliste. Il travaille sans réel enthousiasme pour un quotidien de Turin, songeant souvent à quitter le métier sans vraiment y parvenir. Enzo habite, comme l’auteur, dans le quartier de San Salvario où les populations de toutes origines se mêlent, non sans quelques frottements qui irritent vite et pourraient ruiner la relative paix sociale qui s’est installée entre ses habitants.

L’histoire de Gino, le petit cochon purement italien, supporter de la Juventus que Joseph élève sur son balcon, pourrait bien mettre le feu aux poudres depuis qu’il a été filmé se promenant tranquillement dans la mosquée du quartier. Qui est responsable de cette mise en scène et de sa diffusion ? Joseph s’est-il fait piégé ? En tout cas, l’évènement ne laisse indifférent personne, des musulmans qui fréquentent la mosquée aux xénophobes qui entendent bien défendre jusqu’au bout Gino, symbole des symboles d’une vraie italianité, en passant par les défenseurs des animaux et du bien-être animal.

Rédacteur

Marc Ossorguine

Pressentiment, Andrea Canobbio

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Pressentiment, janvier 2015, traduit de l’italien par Vincent Raynaud, 88 pages, 11 €

 

« Le matin du 24 mars 2001, un samedi, j’ai pris un avion de Turin à Londres. Au sol il faisait beau… Quand je suis monté, j’étais nerveux. L’avion était à moitié vide, presque entièrement vide. S’il s’écrasait, il y aurait moins de victimes. Moins de tapage, moins d’attention ».

Pressentiment est le récit nerveux des crises de panique qui touchent l’écrivain italien lorsqu’il prend l’avion, comme si une catastrophe imminente s’annonçait. Pressentiment en ce début d’année 2001, qui sera celle de la chute, de la déflagration, de l’homme qui tombe, des fenêtres ouvertes sur le monde en feu. Rien de divinatoire dans tout cela, mais le sentiment permanent qu’il y une catastrophe dans l’air.

L’écrivain – éditeur aux aguets – se doute inconsciemment de quelque chose. Il va accumuler les indices pour ce court récit en forme d’enquête sur ses constats, ses ressentis et ses terreurs. A l’origine de tout, sa présence à New-York le 11 septembre et le court texte paru deux mois plus tard dans la revue L’Indicel’air conditionné, les ascenseurs, même le ventilateur d’un ordinateur me fait sursauter… la journée n’en finit pas, elle n’en finit plus.

Rédacteur

Philippe Chauché

L’œuvre poétique, Giorgio Caproni

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L’œuvre poétique, trad. de l’italien par Isabelle Lavergne, Jean-Yves Masson, Philippe Renard, Bernard Simeone, 1024 pages, 45 €

 

« Tout dit le renoncement qui conduit vers le Même. Le renoncement ne prend pas, mais il donne. Il donne la force inépuisable du Simple. Par l’appel, en une lointaine Origine, une terre natale nous est rendue ».

Martin Heidegger, Le Chemin de campagne, in. Questions III et IV

 

Le Poème de Caproni est un Homme qui doute de sa propre histoire, une « pOeuvretique » (contraction de L’œuvre poétique), un esprit, une parole athéologie, condition nécessaire du vide pour vivre son humanité et entièrement placée sous le signe de l’adieu, non pas à Dieu, mais de la non-existence de Dieu, puisqu’il n’est plus !

Rédacteur

Marc Michiels (Le Mot et la Chose)

Poésie en forme de rose, Pier Paolo Pasolini

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Poésie en forme de rose, préface et traduction de René de Ceccaty, édition bilingue et intégrale, mars 2015, 489 pages, 12 €

 

Plonger dans la fabrique des films de Pasolini. Etre emporté par un souffle épique ultra-contemporain, où se perçoivent des accents de Dante ou de Leopardi. Recevoir de plein fouet le choc d’images d’une beauté plastique barbare, nostalgique ou désespérément réaliste. Comprendre l’époque noire de la vie politique, économique et sociale italienne dans les années 60, qualifiée par l’auteur de « décennie ridicule » – et par bien des côtés si semblable à notre début de siècle… Tout cela est enfin possible pour le lecteur français grâce à cette première édition intégrale et bilingue, présentée par René de Ceccaty, traducteur fidèle et inspiré autant que spécialiste de l’Italie et de Pasolini, qui nous rend ce texte accessible grâce à une préface documentée et un appareil de notes faisant de cette édition de poche un ouvrage précieux.

Sans doute plus connu du public français pour son œuvre de cinéaste, les scandales associés à son nom, sa fin violente – et mystérieuse – à 53 ans – Pier Paolo Pasolini, également romancier, essayiste, épistolaire, témoin révolté des injustices sociales, et poète à la place originale, reconnu par ses pairs (parmi ses amis, Attilio Bertolucci, Elsa Morante et Moravia…), occupe une place de premier plan dans la vie littéraire italienne.

Rédacteur

Marilyne Bertoncini

Trois années-lumière, Andrea Canobbio

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Trois années-lumière (Tre anni luce), janvier 2015, traduit de l’italien par Vincent Raynaud, 429 pages, 26,50 €

 

Cécilia, Sylvia, Viberti.

Deux femmes, un homme.

Deux sœurs, un amant.

Deux rivales, un amoureux transi et pusillanime.

Un, deux, trois !

Situation triangulaire classique en littérature, traitée de façon singulièrement intéressante par Andrea Canobbio.

Viberti est médecin, interne dans l’hôpital où Cecilia est elle-même médecin urgentiste. Ils ne se connaissent pas, jusqu’au jour où Viberti s’intéresse au cas clinique d’un jeune garçon anorexique, Mattia, qu’il découvre dans un service de l’hôpital où il passe par hasard.

Rédacteur

Patryck Froissart

Ma Fille Folie, Savina Dolores Massa

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Ma Fille Folie (Mia Figlia Follia), mars 2015, traduit de l’italien par Laurent Lombard, 200 p. 21 €

Ma Fille folie est le récit d’une illumination, celle de l’impossible fécondation puis de l’incroyable maternité de Maddalenina, la folle du village, une invalide de cinquante ans. Bénie par les saints et pénétrée par un cierge consacré, elle se voue à trois époux dont elle appelle l’attention et l’amour par sa présence silencieuse : un jeune garçon, descendant d’une noble famille décadente, un professeur humilié par ses amours inverties, un paysan solitaire et stérile comme les terres qu’il s’obstine à labourer. Chacun dévoilant peu à peu ses secrets sous l’œil limpide de la Mère que tous ignorent ; chaque apparence de respectabilité se fissurant devant cette vieille petite fille, mal fagotée, mal chaussée.

Maddalenina s’en vient visiter Maria Carta, la guérisseuse devenue muette, vieille femme assise devant sa maison, vouée à l’observation d’un prunier aussi décrépi qu’elle. Maddalenina lui confie toutes ses pensées, ses sensations de future mère, elle lui raconte ses extases, ses espoirs et revient sur son enfance, sa vie de femme mise à l’écart par tous les membres du village sarde. Dans sa langue malhabile et crue, elle pose d’incessantes questions, elle met à nu son être innocent, et sans s’en rendre compte, les travers de tous les bien-pensants qui se vautrent dans le vice, tout en jouant les grenouilles de bénitiers.

Rédacteur

Myriam Bendhif-Syllas

La mer couleur de vin, Leonardo Sciascia

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La mer couleur de vin, traduit de l'italien par Jacques de Pressac mai 2015, 192 pages, 15,50 €

 

Le genre de la nouvelle est difficilement maîtrisable, dit-on, pour un écrivain ayant l’intention d’inclure dans ce type de récit autant de force de conviction et d’intensité que dans un roman, catégorie prétendument plus aisée pour l’atteinte de ce type de but. Leonardo Sciascia, dans un recueil de nouvelles intitulé La mer couleur de vin, contredit magnifiquement ce présupposé. Il parvient à y décrire pêle-mêle le mirage d’un voyage organisé par un passeur sans scrupules, monnayant ses services fort cher pour organiser un voyage vers l’Amérique… Las, la traversée se termine au point de départ : « Ils se jetèrent assommés sur le bord du fossé : il n’y avait pas urgence à porter aux autres la nouvelle qu’ils avaient débarqué en Sicile ».

Dans la nouvelle la plus longue, La mer couleur de vin, ayant donné son titre à l’ouvrage, il est question du voyage en train d’un ingénieur quittant Rome pour Reggio de Calabre en Sicile. Cet homme, ayant choisi a priori une vie solitaire, est fasciné par les enfants de la famille dont il partage le compartiment. Comme si ces derniers ravivaient en lui le regret toujours vivace de n’avoir pas adopté une vie de famille, d’avoir configuré son existence autrement :

Rédacteur

Stéphane Bret

Si une nuit d’hiver un voyageur, Italo Calvino

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Si une nuit d’hiver un voyageur, avril 2015, trad. de l’italien par Martin Rueff, 400 pages, 8 €

 

Paru en italien en 1979, Se una Notte d’Inverno un Viaggiatore a été traduit sous le titre Si par une Nuit d’Hiver un Voyageur en 1981 aux éditions du Seuil. Cette traduction n’est plus disponible couramment aujourd’hui, et voici qu’une nouvelle, sous le titre Si une Nuit d’Hiver un Voyageur, paraît aux éditions Gallimard, dans la collection Folio. Dès le titre, on voit le parti pris par Martin Rueff, le nouveau traducteur : là où Danièle Sallenave et François Wahl tendaient à rendre la littérarité du titre, lui, il en rend la littéralité. Même si l’on n’est pas italophone, on sent la nuance.

Dans la nouvelle traduction, ce qui est sensible à la comparaison avec le texte italien, c’est un double mouvement : d’une part coller au texte originel ; d’autre part s’éloigner de la première traduction. Exemple avec la première phrase du deuxième chapitre : « Il romanzo comincia in una stazione ferroviaria, sbuffa una locomotiva, uno sfiatare di stantuffo copre l’apertura del capitolo, una nuvola di fumo nasconde parte del primo capoverso ». Dans la version Sallenave/Wahl, ça donne ceci : « Le roman commence dans une gare de chemin de fer, une locomotive souffle, un sifflement de piston couvre l’ouverture du chapitre, un nuage de fumée cache en partie le premier alinéa ».

Rédacteur

Didier Smal

La Boutique Vif-Argent, T.1 Une Valise d’étoiles, Pierdomenico Baccalario

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La Boutique Vif-Argent, T.1 Une Valise d’étoiles, mai 2015, traduit de l’italien par Diane Ménard, illustré par Iacopo Bruno, 240 pages, 15,50 €

 

« Araignée Répare-Bicyclette

Tue-Mages, Dijon, XIIIe siècle

Mort qui Parle, Cagliostro, XVIIIe siècle

Pantalon en Pur Fil d’Écosse qui Marche Tout Seul

Bâton et Signes du Voyage

Poudre Professionnelle Coupe-Souvenirs

Glom (Grand Livre des Objets Magiques) »

Rédacteur

Myriam Bendhif-Syllas

La parole contraire, Erri de Luca

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La parole contraire, traduit de l’italien Danièle Vain, janvier 2015, 40 pages, 8 €

 

« Ptàkh pìkha le illèm » : « ouvre ta bouche pour le muet »

(Proverbes/Mishlé 31/8) cité par Erri de Luca, p.18

 

La parole contraire est le récit, ou plutôt une sorte d’argumentaire de Erri de Luca dans sa condamnation pour « incitation au sabotage »… Incitation au sabotage… Vraiment ? C’est en tout cas ce qu’a déclaré le tribunal à partir des phrases écrites dans le Huffington Post Italie, et l’Ansa (équivalent de l’AFP) par Erri de Luca lui-même. Erri de Luca refuse le terme « acte terroriste » même s’il se reconnaît une maladive incitation à la résistance qui lui vient de son enfance et plus exactement de ses lectures.

Rédacteur

Marie-Josée Desvignes

Poésie en forme de rose, Pier Paolo Pasolini (2ème article)

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Poésie en forme de rose, mars 2015, traduit de l’italien par René de Ceccatty, édition bilingue, 496 pages, 12 €

 

« La mort ne consiste pas à ne pas pouvoir communiquer mais à ne plus pouvoir être compris ».

Pier Paolo Pasolini, écrivain, essayiste, poète, journaliste, témoin révolté des injustices sociales, cinéaste, se situant toujours en dehors des institutions, d’une « opposition pure », a su observer mieux que personne les interstices mouvants de la société italienne de l’après-guerre, et ce, jusqu’à son assassinat dans la nuit du 1er au 2 novembre 1975, sur la plage d’Ostie, à Rome. Soucieux d’une mise en scène de sa vie et de l’histoire de sa création, Pasolini croyait à la force symbolique du coup de poing – tendu – face au monde des hommes bien nés ! Croyait tout autant à la force symbolique du coup de point – reçu – par un excès d’amour, détachement sans fin des êtres aimés, irriguant l’idée de n’être, finalement, aimé de personne ! Publié au sommet de la gloire de l’écrivain en 1964, pendant le tournage de L’Évangile selon saint Matthieu et après celui de La Ricotta, Poésie en forme de rose fait réapparaître un écrivain dans la sphère de son intimité, témoignage d’une expérience individuelle marqué par les cicatrices de ses passions, hanté par une question essentielle : la poésie peut-elle dire la réalité dans l’espace des expériences poétique, politique et linguistique ?

Rédacteur

Marc Michiels (Le Mot et la Chose)

Où étiez-vous tous, Paolo di Paolo

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Où étiez-vous tous, traduit de l'italien Renaud Temperini, septembre 2015, 206 pages, 11,99 €

 

Avec Où étiez-vous tous, Paolo di Paolo fait le portrait d’un homme et plus sûrement encore celui d’une époque.

Dans La Repubblica, Antonio Tabucchi a écrit : Plutôt que de le définir comme un roman de jeunesse, on peut voir dans « Où étiez-vous tous », le coup d’essai très réussi d’un art narratif engagé et mûr.

C’est l’histoire d’un père ? vieux, à la retraite donc, de l’enseignement et qui renverse un de ses anciens élèves qui lui fait un procès…

Prétexte à un retour en arrière sur la vie du narrateur Italo Tramontane, jeune étudiant en Histoire et celui d’une génération d’après-guerre. La note de l’auteur en fin d’ouvrage prend soin de signaler que « ce roman s’est au départ inspiré d’un fait divers. Un professeur exaspéré renverse deux élèves avec sa voiture » et que « au-delà de cette première idée, tout le reste est bien entendu le fruit de l’imagination »…

Rédacteur

Marie-Josée Desvignes

Le tort du soldat, Erri de Luca

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Le tort du soldat, novembre 2015, trad. de l’italien par Danièle Valin, 96 pages, 5,80 €

 

Le tort du soldat est un court texte où s’imbriquent plusieurs histoires dont les éléments et les personnages s’opposent ou se font écho dans un jeu de contrastes et de décalages, de parallèles ou de variantes. Erri de Luca y interroge la nature humaine au travers de l’histoire de la shoah, tout en donnant à lire un monde où la nature s’ouvre sur le divin. Démultipliant les perspectives, il entremêle habilement les fils du réel – tant autobiographique qu’historique – et ceux de la fiction, tricotant un maillage souple et aéré qui laisse le lecteur se glisser entre les lignes.

L’argument de départ est simple. Un écrivain italien part dans les Dolomites pour s’adonner à sa passion de l’escalade, emportant avec lui les photocopies du manuscrit en yiddish dont il doit assurer la traduction. Il entre un soir dans une auberge pour y prendre une bière et se mettre au travail. A la table voisine, une femme l’observe et lui sourit en silence avant d’être rejointe par un vieil homme visiblement inquiet avec lequel elle s’entretient en allemand. Le couple finit par quitter l’auberge de manière précipitée, s’engouffrant dans une voiture blanche. Regagnant son hôtel, l’écrivain aperçoit au fond du ravin la carcasse blanche d’une voiture accidentée…

Rédacteur

Emmanuelle Caminade

L’Oncle aquatique et autres récits cosmicomics, Italo Calvino

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L’Oncle aquatique et autres récits cosmicomics, septembre 2015, trad. de l’italien par Jean Thibaudeau (revue par Mario Fusco) et Jean-Paul Manganaro, 128 pages, 2 €

Ce petit volume de la collection « Folio 2 € » reprend quatre récits précédemment parus dans le recueil Cosmicomics. Récits anciens et nouveaux (Folio, n°5666) : La distance de la Lune, L’oncle aquatique, Les dinosaures, Les filles de la Lune. Il les encadre d’une « note de l’auteur », publié originellement comme postface à la deuxième édition italienne de La memoria del mondo e altre storie cosmicomiche en 1975, et d’une chronologie biographique.

S’il n’est pas besoin d’une introduction pour apprécier la poésie de ces quatre contes, la lecture préalable de la note en précise toutefois la portée et en explique le dispositif. Calvino s’y explique ainsi sur le terme cosmicomics qualifiant ces récits : « Dans l’élément cosmique, pour moi, il n’y a pas tant le rappel de l’actualité “spatiale” que la tentation de me remettre en rapport avec quelque chose de bien plus ancien. Chez l’homme primitif et chez les classiques, le sens cosmique était l’attitude la plus naturelle ; nous, au contraire, pour affronter les choses trop grandes et sublimes nous avons besoin d’un écran, d’un filtre, et c’est là la fonction du comique ». Partant de la cosmologie moderne, le pari est de faire « jaillir de cet univers invisible et presque impensable des histoires capables d’évoquer des impressions élémentaires comme les mythes cosmogoniques des peuples de l’Antiquité ».

Rédacteur

Ivanne Rialland

Le Décaméron, Boccace

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Le Décaméron, trad. de l’italien par Giovanni Clerico, 1056 pages, 12,40 €

 

Voici, signé Boccace, un parfait roman d'été : des intrigues à foison, des histoires à destination des dames, du rire, assez bien de sexe, un peu de larmes et de réflexion, un chouia de morale, et le tout est emballé. A vrai dire, c’est le roman de l’été depuis 1353, mais ne chipotons pas sur l’appartenance ou non à l’actualité littéraire : Le Décaméron, première grande œuvre en prose de la littérature italienne, a traversé bientôt sept siècles sans jamais voir fléchir la courbe de son succès ; nous verrons si les romans à la mode traverseront quant à eux sept semaines.

L’histoire est connue : en 1348, durant que la peste frappe cruellement Florence (le chapitre introductif est apocalyptique), sept demoiselles et trois jeunes gens trouvent refuge, entourés de leurs serviteurs, dans successivement deux luxueuses propriétés, quasi édéniques, quelque peu éloignées de la ville. Pour agrémenter leur séjour, ils décident que chacun d’entre eux devra raconter aux autres une nouvelle chaque jour – sauf le vendredi et le samedi, dédiés respectivement à la mémoire des souffrances du Christ et au repos. Donc, durant ce total de quatorze journées, ce sont cent nouvelles qui vont être racontées, cent histoires remarquables par leurs protagonistes et, surtout, leur dénouement.

Rédacteur

Didier Smal

Le feu de Jeanne, Marta Morazzoni

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Le feu de Jeanne, octobre 2015, trad. italien Marguerite Pozzoli (Il fuoco di Jeanne), 189 pages, 18,50 €

 

C’est plus à une exploration empreinte d’une certaine nostalgie que nous convie Marta Morazzoni en partant sur les traces de celle qui n’était peut-être pas que la paysanne lorraine que l’histoire a retenue et exploitée, en faisant l’étendard de causes pas toujours compatibles entre elles. On peut trouver un peu anachronique une telle quête, ou pire, la penser suspecte d’on ne sait quelle nouvelle exploitation idéologique et politique. Ce serait oublier ce qu’il peut y avoir d’étrange, d’inexpliqué, voire de fascinant dans le destin de la Pucelle – sans doute bien reconstruit par la légende, par l’histoire ou par ceux qui les écrivent. Le cinéma ne s’y est pas trompé qui a à maintes reprises tenté de donner visage, chair, regard et voix au personnage, de Renée Falconnetti (1) à Sandrine Bonnaire (2), ou d’Ingrid Bergman (3) à Jean Seberg (4). Et nous ne parlerons pas de la peinture, du théâtre, de la musique, de la chanson… Histoire et fiction se sont emparées régulièrement du personnage et ce Feu de Jeanne pourrait n’être qu’un volume de plus dans une longue série. Mais en même temps, nous ne sommes ici ni sur le territoire de fiction, ni sur celui de la rigoureuse recherche historique. Mêlant l’autrefois des neiges d’antan, et l’aujourd’hui, Marta Morazzoni nous entraîne dans une recherche/rêverie des traces du mythe, sur les lieux même où son histoire s’est déroulée, de la Lorraine au Pays de Loire, de Paris à la Normandie.

Rédacteur

Marc Ossorguine

Le Moine de Képhas, Angelo Boschetti, Stepano Brasi

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Le Moine de Képhas, traduit de l’italien par Olivero Garlasseri 283 pages

 

Loin de Michel Houellebecq, Le moine de Képhas nous plonge dans une fiction vs prémonitoire. Assassinat d’un imam de la mosquée de Villeurbanne, rebellions musclées dans les banlieues, chars antiémeutes, arrestations, comparutions immédiates, explosions, attentats, victimes innombrables, gouvernement ahuri et débordé, président mutique au charisme mou, couvre-feu, plan Vigipirate écarlate. L’état de guerre est déclaré. Les politiques et hauts fonctionnaires de l’Etat – vieille école de l’ombre « le seul endroit où l’on peut encore penser avant d’agir contre la génération Sciences-Po, ENA, où l’on forme depuis quatre décennies des bans entiers de squales débridés, sans maître, sans foi, sans loi, qui iront diriger le pays comme on gère une banque, sous les feux de la rampe ; pas de réflexion, juste de l’instinct – pensent fissa et en coulisses d’abord à leur carrière qui file en quenouille, la menace terroriste créant l’opportunisme de leur montée ou de leur rétrocession en grade, avec pertes et profits de leurs passe-droits matériels et sexuels. Les décisions politiques se prennent en fonction de la courbe des sondages. L’équipe gouvernementale fictionnelle en caricature d’autres, récentes ou actuelles.

Rédacteur

Mélanie Talcott
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